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"La démission de Macron serait dangereux pour la Vème République"

"La démission de Macron serait dangereux pour la Vème République"

Un article rédigé par Florian PERRAY - RCF Anjou, le 14 octobre 2025 - Modifié le 14 octobre 2025
L'invité de RCF Anjou"La démission de Macron est impossible, la seule solution c'est la dissolution"

Sébastien Lecornu joue-t-il son avenir aujourd'hui ? Le premier ministre tiendra son discours de politique générale à 15h, devant l'Assemblée Nationale. Un moment qui pourrait sceller, une nouvelle fois, le destin du gouvernement, à peine nommé. On en parle avec Arnauld Leclerc, professeur en Sciences politiques à l'Université de Nantes.

Arnauld Leclerc, professeur de science politique à l'université de Nantes ©DRArnauld Leclerc, professeur de science politique à l'université de Nantes ©DR

RCF : A votre avis, combien de temps va durer ce gouvernement cette fois-ci ?

Arnauld Leclerc : Sans doute très peu de temps. La France Insoumise et le Rassemblement national veulent censurer ce gouvernement, donc il suffit que les socialistes et écologistes s'allient pour qu'il tombe. En réalité, s'il n'y a pas d'avancée sensible dans la déclaration de politique générale du premier ministre vers les socialistes, notamment autour de la réforme des retraites, ce gouvernement sera mort-né.

 

RCF : Il y a des noms qui vous ont surpris dans la composition de ce nouveau gouvernement. Le maintien de Gérald Darmanin à la justice ? Ou l'arrivée Jean-Pierre Farandou au travail ? 

Arnauld Leclerc : D'un certain point de vue, pas vraiment. On reste dans un gouvernement qui est à peu près l'équivalent de Lecornu 1, mais aussi l'équivalent de celui de François Bayrou et Michel Barnier. Nous sommes toujours dans ce socle politique allant des « macronistes purs » à quelques anciens LR.

 

RCF : C’est un gouvernement de « fin de règne » ? Le but c’est de récompenser les gens qui soutiennent Emmanuel Macron ? Ou on voit les mêmes têtes parce que, finalement il n’y a plus grand monde qui veut rentrer au gouvernement ?

Arnauld Leclerc: C'est sans doute un peu des deux, plus un troisième élément derrière qui est qu'Emmanuel Macron n'arrive pas à faire une réelle ouverture politique. Donc il travaille toujours avec les mêmes éléments qui ne sont pas majoritaire. C’est pour ça que c’est très fragile. Au mieux ce gouvernement, il ira jusqu'à la fin du budget, c'est-à-dire début janvier. C'est vraiment ce qu’il peut lui arriver de mieux, mais il peut tomber bien avant et dès cette semaine.

 

RCF : Les grands perdants de ces changements successifs de gouvernement, est-ce que ce ne serait pas le parti LR ?

Arnauld Leclerc : Il y a une recomposition de la scène politique, donc il est confronté à quelque chose qui est assez difficile. Il existe deux grandes droites aujourd'hui en France, soit l'une de centre-droit autour de la galaxie Macron, soit de droite plus radicale autour du Rassemblement national et entre les deux c'est très difficile d'exister. On voit bien qu'il y a des candidats, à l'intérieur des Républicains, qui préfèrent aller vers Emmanuel Macron, d'autres qui préfèrent aller vers le RN. Et puis une petite frange entre les deux qui, à la fois, s'est un peu alignée idéologiquement sur le RN et se veut indépendante, qui est la ligne de Bruno Retailleau.

 

RCF : C'est un parti qui n’a toujours pas trouvé son identité propre ?

Arnauld Leclerc : C'est obligatoire à partir du moment où il y a une très grande recomposition politique. C'est une restructuration d'ensemble. Toutes les forces politiques sont confrontées à ce genre de problème et en particulier celle qui était très installée.

 

RCF : Comme vous le dites, le gouvernement va peut-être rapidement chuter. A quoi ça sert d’être ministre en ce moment ? Quelle est leur marge de manœuvre ?

Arnauld Leclerc : Être ministre, en ce moment, ça ne sert pas à grand-chose, à part traiter quelques dossiers d'urgence absolu. Les conséquences, c'est quand même d'assister à un risque de de lassitude du côté de la population. Les indicateurs nous montrent clairement que les gens en ont ras-le-bol, que c'est un spectacle un peu lamentable. Il faut quand même rappeler que tout ça vient d'une dissolution complètement intempestive, faite n'importe comment. Mais c'est sûr que l'image de la politique en sort très détériorée et que quelque part tout ça fait le jeu du Rassemblement national qui se tient un peu à l'écart, qui attend tranquillement. Il y aura une dissolution tôt ou tard et il obtiendra le pouvoir très vraisemblablement.

 

RCF : La seule solution pour sortir du blocage, c'est la dissolution de l'Assemblée nationale ?

Arnauld Leclerc : Dans une démocratie, la seule solution c'est de retourner aux urnes. Il y en a deux types possibles : ou c'est une dissolution et c'est une législative, ou c'est une démission et c'est une présidentielle. On sait qu'Emmanuel Macron ne veut pas démissionner, donc on va avoir une fin de règne un peu chaotique avec une législative pour arbitrer l'absence de majorité actuellement.

 

RCF : Pourtant, même des proches d’Emmanuel macron, comme Gabriel Attal ou Édouard Philippe l’ont appelé à démissionner. Mais ça, pour vous, c’est à exclure totalement ? 

Arnauld Leclerc : Ça relève de sa seule conscience. Autrement dit, il peut y avoir les pressions qu'on veut, ça n'a rien de caractère automatique. Et puis l'autre chose, c'est que cette démission créerait un précédent assez fâcheux. Ça veut dire que dans l'avenir au moindre pépin politique quelconque pour un président, il y aura tout de suite cette idée : il doit démissionner. Le système de la Vème République, c'est quand même que la clé de voûte du système, c'est le président. Reste que l'outil le plus logique à utiliser dans un cas comme celui-là, c'est la dissolution.

 

RCF : Dix-huit députés viennent de réclamer l'instauration de la proportionnelle. Ça pourrait être une idée pour sortir du blocage ?

Arnauld Leclerc : La proportionnelle toute seule, surtout pas ! Elle ajouterait de la fragmentation puisqu’elle favorise les petits groupes. Donc ce qu'il faut comprendre c'est que ce n'est pas juste une réforme du mode de scrutin qu'il faut repenser. C'est aussi tous les outils pour construire une coalition. Il existe plusieurs outils : en Belgique, on nomme des préfigurateurs; en Allemagne, on négocie un contrat de gouvernement; en Italie, on annonce au moment de l'élection quelle coalition va faire. Rien de tout ça n'existe en France. Et donc si on met un outil comme la proportionnelle qui va encore augmenter la diversité des groupes politiques à l'intérieur de l'assemblée, alors il faudra coûte que coûte créer une coalition.

© RCF Anjou
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
L'invité de RCF Anjou
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