La première canicule de l’été s’achève. L’une des conséquences de cette forte chaleur, c’est la forte hausse du risque d’incendie de forêt. Depuis quelques années, les soldats du feu ont reçu le renfort de drones et de plus en plus de l’intelligence artificielle.
L’été 2025 risque d’être tendu sur le front des incendies, la canicule précoce de cette fin juin fait redouter une saison aussi délicate qu'en 2022. Ce jeudi, 13 massifs forestiers des Bouches-du-Rhône restent fermés par sécurité. Le 29 juin, 400 hectares sont partis en fumée dans l’Aude dans la région de Narbonne.
Aux moyens de lutte anti-incendie classiques (bombardiers d’eau et véhicules 4x4 ) des nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle offrent des perspectives aux soldats du feu dans la lutte contre les incendies. "Ça nous permet de pouvoir analyser la topographie en temps réel, anticiper la progression d'un incendie et parfois calquer différents sinistres qu'il y a eus par le passé" explique Eric Brocardi, président de la fédération nationale des sapeurs-pompiers. "L’IA peut ainsi permettre de faciliter l’anticipation pour positionner des engins, prévoir des moyens aériens et en même temps de garantir une certaine sécurité des personnels".
Par le passé, il y a avait, en particulier dans les départements les plus exposés, des guetteurs saisonniers qui alertaient en cas de départ de feu. De plus en plus, ils sont remplacés par des caméras intelligentes comme celles conçues par Paratronic. Cette société, basée dans l’Ain, elle commercialise notamment des capteurs électroniques. Il y a une vingtaine d’année elle s’est lancé sur ce segment avec un système baptisé Adelie."En 2005, les pompiers sont venus vers nous pour les aider à développer un système qui n'existait pas sur le marché à l'époque, basé sur une caméra et couplé à un système d'analyse d'images pour détecter les plus fines fumées" raconte Patrice Rilly, président de Paratronic. Comme les guetteurs, les caméras sont placées sur des points hauts pour avoir le plus de visibilité. "Quand on est à 20 km de distance lorsqu’un feu démarre, on ne le voit pas. Ce qu'on détecte, c'est la fumée. L’intelligence artificielle embarquée dans la caméra permet de la distinguer très tôt" ajoute Pierre-Moana Levesque, directeur de la recherche et développement chez Paratronic. "Une fois l’alerte émise au PC, le pompier va pouvoir regarder avec une seconde caméra pour lever le doute et aider au positionnement précis du feu sur la carte pour ensuite envoyer les secours le plus rapidement possible" complète l’ingénieur.
Cela constitue un gain de temps pour lancer l’alerte et localiser précisément le feu. C’est primordial, car en France, la stratégie de lutte est basée sur la réactivité et l’engagement direct de moyens importants pour limiter la propagation du foyer. Le système fonctionne 24 h sur 24h en détectant la nuit des points lumineux anormaux. Avant d’être opérationnel l’algorithme de l’IA a été entraîné avec des centaines de milliers d’images de paysages de forêt pour être capable de reconnaître une fumée et de la distinguer par exemple d’un nuage ou d’une brume. L’entreprise a équipé une dizaine de départements principalement dans le sud de la France. Face à l'augmentation des risques incendies liés au changement climatique, d’autres technologies d’alerte existent avec des systèmes de capteurs autonomes fixés sur des arbres. Ils détectent les fumées et transmettent l’information ensuite à un PC comme le "burnmonitor" de l’Inria Paris ou le système conçu par l’Université d’Istanbul.
Les drones peuvent intervenir à différents niveaux au cours d’une intervention. Ils vont notamment pouvoir faire de la reconnaissance et faciliter le travail des soldats du feu. “La nuit, alors que ni les Canadairs, ni les hélicoptères ne peuvent voler un drone peut avec une caméra thermique repérer très facilement des points chauds et faire de la reconnaissance sans forcément mettre en danger les personnels” précise Eric Brocardi. Le drone permet en termes d'agilité et de rayon d'action une analyse topographique beaucoup plus rapide. “Ce qui va nous permettre de mieux nous positionner sur le terrain et de mieux adapter la stratégie” ajoute-t-il. Les drones peuvent aussi être couplé à une IA et aider à la prise de décision.
La start-up toulousaine Menaps a ainsi testé un tel système avec les pompiers de l’Aude l’an dernier. Certaines sociétés, notamment en Chine, testent des drones pompiers, il n’est pas impossible d’imaginer dans un futur proche des drones extincteurs agissant en essaim pour attaquer un début d’incendie dans une zone inaccessible. Mais toutes ces innovations ne peuvent pas remplacer le travail des sapeurs-pompiers. “Ce sont des outils d’analyse et d’aide mais la matière grise humaine reste essentielle dans la prise de décision. Les sapeurs-pompiers partagent des expériences et des connaissances acquises sur le terrain” rappelle Eric Brocardi. Les nouvelles technologies ne peuvent pas remplacer non plus la prudence de chacun. La prévention et la sensibilisation du public restent essentielle car 9 départs de feu sur 10 sont d’origine humaine.
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