Etre diacre aujourd'hui, en Haute-Savoie
Trois hommes sont ordonnés diacres entre juin et septembre 2024, dans le diocèse d'Annecy. Un ministère restauré il y a soixante ans tout juste, au moment du Concile Vatican II. Alors, qu'est-ce que cela veut dire, être diacre aujourd'hui ? Et quels sont les enjeux de ce ministère, dans un contexte de sécularisation ? Témoignages.
"Nous ne connaissions pas vraiment le diaconat permanent, jusqu'à ce qu'un ami chemine vers l'ordination. Nous avons participé, en couple, à son équipe d'accompagnement. Et puis un jour, le téléphone a sonné. Un diacre de la paroisse et son épouse nous ont invités à dîner... c'était pour m'appeler à mon tour à réfléchir au diaconat !" raconte Damien Aguesse. Après cet appel, une année de pré-discernement et cinq ans de formation vécues en couple, Damien sera ordonné le 29 septembre à Poisy. "Cet appel au diaconat remonte au tout début de l'Eglise. Les apôtres, débordés par l'annonce de la Parole, ont délégué à certains disciples la mission de service. Le ministère s'est ensuite perdu. Puis les pères conciliaires, au moment de Vatican II, ont estimé bon de réinstaurer ce ministère qui incarne Jésus serviteur" résume Hubert Vaudaux, diacre et délégué épiscopal au diaconat permanent, pour le diocèse d'Annecy. Aujourd'hui dans le diocèse d'Annecy, des hommes, en général en activité professionnelle sont régulièrement appelés au diaconat. Ils s'engagent à rester dans l'état de vie du jour de leur ordination (mariage ou célibat).
Je suis interpellé sur l'Eglise ou la foi en faisant mes courses ou en tondant ma pelouse !
"Notre ministère n'est pas toujours bien connu ou compris des catholiques ! D'autant que nous l'incarnons tous différemment, avec nos vies, nos personnalités, nos missions diverses. Avant les 3 nouvelles ordinations, nous sommes 25 diacres en Haute-Savoie... Il y a autant de manières de vivre ce ministère que d'ordonnés" souligne Vincent Fontaine, diacre responsable de la formation des futurs ordonnés. Ce qui unit finalement les diacres, c'est donc la notion de service : service de la charité, de la liturgie et de la Parole de Dieu. Au jour de son ordination, l'évêque, auquel il est directement rattaché, confie au diacre permanent une mission. "Le diacre rappelle à tous les baptisés qu'ils ont leur part à prendre pour être attentifs aux plus petits et aux réalités actuelles" analyse le père Jean-Claude Mutabazi, curé à Thonon. Le diacre est aussi signe de l'Eglise dans son milieu de vie : au travail, en famille, avec ses amis, dans la cité... "Je suis régulièrement interpellé sur l'Eglise ou sur la foi, dans ma vie quotidienne. Cela peut être en faisant mes courses ou en tondant ma pelouse !" raconte Paul Gruffaz, ordonné en 2000. "Depuis que je chemine vers le diaconat, je suis encore plus attentif à la dimension d'annonce de la Parole. Cela me tient vraiment à cœur de faire connaître ce trésor à tous... et d'en vivre !" confie Yannick Angelloz, ordonné le 30 juin 2024. Pour unifier sa vie et vivre son ministère, le diacre s'engage d'ailleurs à cultiver sa relation avec le Christ, dans la prière et la lecture de la Parole : il doit prier matin et soir et participe à des groupes où les diacres et leurs épouses relisent leur vie, à la Lumière de l'Evangile.
Même si nous avions assez de prêtres, nous aurions toujours besoin de diacres
Dans une société sécularisée, le diaconat permanent représente donc un enjeu pour l'Eglise : "Même si nous avions assez de prêtres, nous aurions toujours besoin de diacres ! Leur ministère est différent et essentiel. Ce ne sont ni des sous-prêtres ni des supers-laïcs !" souligne Monseigneur Yves Le Saux, évêque d'Annecy. Une baisse des vocations qui met d'ailleurs ce ministère sur le fil : il y a un risque, pour sa communauté locale, de sur-solliciter le diacre permanent pour célébrer baptêmes et mariages... au détriment de sa vie privée ou des autres aspects de sa mission. Soixante ans après la restauration du diaconat permanent, le diacre et son épouse, quand il est marié, acceptent, finalement toujours de chambouler un peu leur vie personnelle, conjugale et familiale, ainsi que leur rapport à l'institution ecclésiale. "Le parcours avant l'ordination est long, mais c'est finalement un temps bénéfique pour mûrir la décision. Je suis prête !" lance Anne Aguesse, énergiquement. "Il m'arrive, bien sûr, d'être en désaccord avec l'Eglise. Mais mon mari, par l'ordination, est membre du clergé : notre parole peut être entendue comme celle de l'institution. Nous sommes donc attentifs à ce que nous disons. Par ailleurs, c'est aussi beaucoup de joie de faire partie de cette famille ! " conclut Florence Gruffaz.
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