"Et si on levait les yeux" : face aux écrans, un instit' emmène ses élèves en pleine nature
“Et si on levait les yeux”, invitation à se tourner vers la nature et notre entourage. Le lien social, à l’épreuve d’une société où tout s’emballe, à l’heure où les écrans semblent rois. Chaque jour, un adulte passe près de 5 heures devant un écran. Plus de 4 heures pour les enfants de 6 à 17 ans. Comment reconnecter les ados à cette joie simple d’être ensemble ? Gilles Vernet, instituteur, a mené une expérience unique avec sa classe de CM2. Emmener ses élèves en pleine nature pendant dix jours en déconnexion totale. Le film, suivi d'un débat, est projeté ce vendredi 12 décembre à 18h30 à la salle polyvalente de Barberaz.
© Wake Up ProductionRCF : Quel a été le déclic pour tourner ce film ?
Gilles Vernet : Le Covid-19 a été un basculement numérique, j'ai assisté à une chute du niveau du langage. Le basculement le plus notable a été l'arrivée des écrans individuels dans toutes les strates de la société. Entre amis, parce qu'on va se retrouver sur les jeux-vidéos en ligne, au sein même de la famille, parce que chacun est sur son écran, sur son réseau.
Ce qui est intéressant, dans votre film, c’est qu’on se met à hauteur d’enfant, on les écoute beaucoup. Il y a même un de vos élèves qui vous dit, le portable, c’est comme un psychopathe, qui a pris en otage mes propres parents ?
G.V : Les enfants sont très drôles. Certains m'ont dit que le téléphone est comme un fil qui s'attache à notre cerveau, ou d'autres m'ont rapporté que leurs parents allaient se marier avec leur téléphone. Ces histoires disent quelque chose sur le lien affectif, son amoindrissement. Se consacrer à son enfant, ça prend du temps. Et le problème, c'est que les écrans cannibalisent notre temps, qui est précieux. Je regrette que les parents se sentent moins autorisés à imposer à leurs enfants des règles. L'école doit s'emparer de l'éducation des enfants en les avertissant des dangers des écrans, et en les guidant vers de bons usages. Le contrôle parental est inévitable. Le smartphone est un concentré d'addictions. Préférez l'ordinateur portable à un téléphone portable pour un collégien.
Êtes-vous favorable à une interdiction des réseaux sociaux pour les adolescents de moins de 15 ans ?
G.V : Oui, j'y suis favorable. J'ai des élèves de CM1/CM2 qui ont un compte Tik Tok. Il faut une grande maturité pour utiliser ses réseaux, et apprendre à dresser les algorithmes. Mais les enfants en sont incapables. Il faut vraiment expliquer au parents, et quand on le fait, sans diaboliser les écrans, ils agissent.
J'aimerai que les parents soient tous responsables, ce n'est pas le cas
Vous parlez souvent de l’école, comme un endroit sanctuarisé. Est-ce vrai, quand on constate qu’au collège par exemple, on est obligé désormais de procéder à des pauses numériques, en Haute-Savoie par exemple, un procédé est utilisé pour contraindre les enfants à laisser leur téléphone portable à l’entrée de l’établissement.
G.V : Que le portable soit présent en cours, c'est un vrai problème. De toute manière, quand on constate que le goût de l'effort, l'attention, et le lange, se réduire dangereusement, il faut prendre des mesures. En revanche, quand les élèves sont prémunis d'une surexposition des écrans, lisent, ils ont une capacité à s'exprimer qui est remarquable. On a visite dernièrement la maison de Victor Hugo, et ils ont compris que maîtriser la langue française est une force.
La lecture est une forme d'émancipation
Une dizaine de jours sans écran, en pleine nature. Avant cela, des échanges avec les parents, avec les élèves eux-mêmes. Y a-t-il eu un après “Et si on levait les yeux” auprès de ces enfants ? Ont-ils passé moins de temps devant leur portable, et ont-ils obtenu de meilleurs résultats scolaires ? On sait que les écrans dégradent le temps de sommeil des adolescents, on sait aussi que le temps d’attention des enfants est réduit à partir du moment où l’on scrolle tous les jours des vidéos de 15-20 secondes que les enfants mettent bien souvent en accéléré…
G.V : Je ne crois pas au miracle, mais à la conscience et à la responsabilité. On doit prémunir nos enfants de ces contenus addictifs, et des réseaux sociaux jusqu'à un certain âge.
Soirée projection débat "Et Si On Levait Les Yeux", ce vendredi 12 décembre à 18h30 à Barberaz en salle polyvalente, en présence du réalisateur Gilles Vernet, en partenariat avec Déclic Savoie.


Chaque jour de la semaine à 6h35 et à 12h08, la rédaction de RCF Savoie Mont-Blanc approfondit un sujet d'actualité locale ou s'intéresse à un événement en donnant la parole à un acteur du territoire.


