En mémoire des rapatriés d’Indochine : Noyant prépare son espace muséal avec une exposition inédite
À travers une exposition temporaire installée au Puits des Arts, ancienne mine de la commune, Noyant met en lumière une mémoire toujours vivante : celle des Français d’Indochine arrivés dans le village dans les années 50. Une étape importante avant l’ouverture d’un espace muséal dédié à cette histoire.
Portraits de rapatriésL’exposition retrace l’arrivée et l’installation de milliers de rapatriés d’Asie de l’est et du sud-est au cœur du Bourbonnais, après la guerre d’Indochine. Organisée dans l’ancienne salle des machines de la mine, devenue le Puits des Arts, cette exposition constitue une première étape vers la mise en place d’un musée dédié à la mémoire des rapatriés d’Indochine. Plus qu’un simple devoir de mémoire, il s’agit de rendre visible une histoire toujours vivante, car certaines familles venues d’Asie vivent encore à Noyant. Cette démarche permet aussi une redécouverte de la guerre d’Indochine, un conflit longtemps survolé dans l’enseignement de l’histoire en France.
Une arrivée massive, une intégration progressive
La fermeture de la mine en 1943, sous l’occupation allemande, entraîne le départ des mineurs et vide ainsi des quartiers entiers, laissant près de 250 maisons de coron inoccupées. Ces logements deviennent, quelques années plus tard, les nouveaux foyers des rapatriés venus d’Indochine. Entre 1955 et 1965, près de 3 000 personnes, soit plus de la moitié des rapatriés indochinois accueillis en France, s’installent à Noyant, un village qui ne comptait jusque-là que 650 habitants. Les familles, souvent nombreuses (jusqu’à huit enfants) participent à repeupler le territoire. L’intégration s’est faite progressivement, notamment grâce à l’école et au sport, créant un métissage culturel entre les traditions d’Indochine et celles du Bourbonnais.
Des défis d’adaptation dans un village solidaire
L’installation dans le village n’est pas sans difficultés pour ces familles venues d’Indochine : les logements sont sommaires et certaines, autrefois aisées, doivent désormais partager un puits sans sanitaires avec d’autres foyers. Pourtant, ces conditions reflètent aussi la réalité des habitants bourbonnais de l’époque, qui n’ont connu l’eau courante qu’à partir des années 1960. Une solidarité se développe avec les familles de mineurs d’origine polonaise ou ukrainienne, déjà présentes dans ce village habitué à la diversité. L’arrivée massive d’enfants bouleverse également l’école. Noyant passe de trois à dix-sept classes en quelques années, accueillant plus de 750 élèves. Les photos de classe montrent une volonté d’intégration, avec des enseignantes françaises accompagnées d’ATSEM originaires d’Indochine pour faciliter les repères culturels. Si certaines mères restent isolées par la langue, les enfants, eux, grandissent entre deux cultures, devenant peu à peu les ponts entre leur passé et leur présent.
Des témoignages précieux pour la mémoire collective
L’exposition présente un ensemble exceptionnel de photographies prises dans les années 1960 par le couple de sociologues Pierre Jean Simon et Ida Simon Barouh. Venu s’installer à Noyant pendant un an, ce couple a documenté l’intégration des rapatriés indochinois. Leurs clichés sont à la base de nombreux travaux ultérieurs, et une salle portera leur nom dans le futur espace muséal. Cette reconnaissance mémorielle fait écho à la proposition de loi portée par Olivier Faure, visant à reconnaître la responsabilité de la Nation dans certaines conditions d’accueil indignes réservées aux rapatriés d’Indochine et à réparer les préjudices subis par eux et leurs familles.
Informations pratiques : L'exposition est ouverte depuis le 1er mai et se poursuivra jusqu’au 1er juin. Elle se tient tous les jours, sauf le lundi, de 14h30 à 18h, au Puits des Arts, une salle de 200 m² située dans l’ancienne mine de Noyant.
