Alsace
Elections législatives 2024 en Alsace : l'opposition entre villes et campagne persiste
Philippe Breton, le président de l'Observatoire de la vie politique en Alsace, revient sur les grandes tendances qui se dégagent du premier tour et ce qui attend les électeurs le 7 juillet.
RCF Alsace : Le 30 juin, le Rassemblement National est arrivé à la tête du 1er tour dans 11 circonscriptions des 15 circonscriptions que compte l’Alsace. Quant au Nouveau Front Populaire, il a remporté 3 circonscriptions strasbourgeoises. Le secteur de Mulhouse Habsheim aura préféré le parti présidentiel aux deux extrêmes. Comment comprendre ce clivage Ville-Campagne ?
Philippe Breton : En Alsace, ce clivage a toujours été un déterminant du vote. Ce sont les grandes villes qui votent à gauche Front populaire et c'est la campagne, le rural, le le périurbain qui vote plutôt pour le Rassemblement national.
RCF Alsace : Ces résultats sont-ils une surprise ?
P. B. : La poussée du Rassemblement national n'est pas tout à fait une surprise, au sens où depuis 25 ans, le Rassemblement National en Alsace monte régulièrement. L' Alsace est traditionnellement une terre de droite qui vit actuellement une grande migration de la droite. Elle a d'abord quitté le centre droit, puis Les Républicains et vient maintenant sur la droite nationale, le Rassemblement national. Néanmoins, La poussée du RN est considérable. Il obtient au premier tour de ces législatives ce qu'il avait au deuxième tour des législatives de 2022, ce qui veut dire qu'il a encore une marge de progression. Tout se jouera sur la question des désistements ou sur la question des triangulaires. Le mot politique de la semaine va être "barrage". Avec une question toutefois : le vieux barrage, le vieux front républicain, la vieille recette du front républicain, va-t-il encore jouer cette fois-ci en Alsace comme dans le reste de la France?
La poussée du RN est considérable
RCF Alsace : Dans la 4e circonscription du Bas Rhin, Raphaële Krattinger du NFP arrivée à 20% des voix, a retiré sa candidature et appelle ses électeurs à voter pour la première des deux candidats encore en lice au second tour : Françoise Buffet, députée sortante de Ensemble qui a obtenu 32,6 % des voix, et Delphine Daubenberger, avec 30,9% des voix. En quoi cette situation exprime ce qui se vit aujourd'hui en France ? Ces candidats qui se retirent, qui appellent à voter pour quelqu'un d'autre ?
P. B. : En tout cas, les électeurs sont probablement un peu perdus parce que il y a encore très peu de temps, vendredi dernier encore, on s'écharpait avec des mots extrêmement durs entre le centre macroniste et le Nouveau Front populaire. Et puis aujourd'hui ce sont des déclarations d'amitié. L'électeur aura peut-être un peu de mal à se retrouver, d'autant que les états-majors peuvent donner des consignes. Or, ce sont les électeurs qui décident. Avec une très forte participation pour ce premier tour, on s'éloigne du noyau dur des électeurs qui, lui, suivent les consignes de leur parti. On rentre dans un électorat beaucoup plus large, où les électeurs d'une certaine façon, sont plus libres puisqu'ils se sont éloignés du noyau des convaincus. La grande interrogation de la semaine, effectivement, va être de savoir si cette vieille notion de barrage de front républicain va résister à la nouvelle situation créée, ou si cette notion n'a plus beaucoup de sens au point que les électeurs se détermineront en fonction de leurs souhaits, de leurs craintes et de leurs frustrations.
La forte participation induit un électorat plus large, et d'une certaine façon, plus libre.
RCF Alsace : Les derniers chiffres officiels font état d'une participation de 65 % dans le Haut Rhin et de 68% dans le Bas Rhin. La mobilisation peut-elle s'amplifier au second tour ?
P. B. : Dans l'idéal, on pourrait rêver à une semaine de débats, d'échanges d'idées, calmement, mais de façon engagée aussi. Malheureusement, l'option qui commence à se dessiner, c'est plutôt l'option d'une dramatisation, d'un glissement vers l'émotionnel, jamais propice au débat. Pour ce qui concerne la participation, si elle n'est pas aussi élevée qu'au premier tout, ce sera peut être le signe que les reports de voix tant attendus par un certain nombre de candidats ne s'opèrent pas et que ce barrage républicain a moins fonctionné que par le passé.
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- 1 juillet 2024
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