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Édito d'Yann Mens - En Afghanistan, les talibans interdisent aux femmes de travailler pour des ONG
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Édito d'Yann Mens - En Afghanistan, les talibans interdisent aux femmes de travailler pour des ONG

RCF, le 28 décembre 2022  -  Modifié le 17 juillet 2023
Le point de vue de 7h55 Édito de Yann Mens - En Afghanistan, les talibans interdisent aux femmes de travailler pour des ONG

Le régime de Kaboul a annoncé que les femmes afghanes ne seraient plus autorisées à travailler dans les organisations non gouvernementales qui jouent pourtant un rôle essentiel dans l’assistance à la population, que ce soit dans le domaine de l’aide alimentaire, médicale ou encore éducative. 

Femmes Afghanes ©Usaid/Pixinio Femmes Afghanes ©Usaid/Pixinio

Officiellement, c’est parce “qu’il y a eu des plaintes sérieuses” concernant le non-respect du port du hijab islamique dans les ONG nationales et internationales que cet interdit a été édicté. En réalité, il fait suite à une série de décisions récentes restreignant les droits des Afghanes, comme l’interdiction d’étudier à l’université ou encore d’accéder aux salles de sport et même aux bains publics, le tout au nom des présumés “risques” de la mixité. Autant de décisions qui témoignent de ce que les éléments les plus conservateurs des talibans ont pris l’ascendant sur la politique du régime. Ou au moins de ce que les autres factions, supposées plus pragmatiques, à défaut d’être plus modérées, n’osent pas s’opposer à la ligne dure. Car c’est l’une des obsessions des talibans que de rester unis pour ne pas s’affaiblir et ainsi garantir leur maintien au pouvoir.

 

À la suite de la décision de samedi dernier, plusieurs ONG internationales, dont Save The Children et Care International, ont décidé de suspendre leurs activités en Afghanistan. ACF a fait de même pour ces activités non vitales, celles qui ne concernent pas la survie immédiate des personnes. Car s’il est possible de mettre en attente un projet psychosocial ou éducatif, la décision est bien plus lourde de conséquences concernant des programmes de distribution alimentaire dans un pays où selon les Nations Unies, près de la moitié des enfants de moins de 5 ans auront besoin d'un soutien nutritionnel vital au cours des 12 prochains mois. 

 

Il sera par ailleurs impossible pour les ONG médicales de remplacer au pied levé des femmes médecins, des infirmières, des aide-soignantes afghanes. Car il faut savoir qu’en Afghanistan, comme dans la plupart des pays du monde où des ONG internationales sont présentes, elles emploient en très grande majorité du personnel local, les expatriés ne représentant qu’une petite minorité de leurs équipes même s’ils sont médiatement plus visibles. En pratique, l’interdit du 24 décembre signifie que des femmes, que des filles risquent ne pas recevoir de soins médicaux, faute que des hommes qualifiés soient disponibles en assez grand nombre pour les leur administrer et qu’ils soient autorisés à le faire. Enfin, dans un pays dont l’économie était jusqu’à l’été 2021 extrêmement dépendant de l’aide internationale, une aide largement gelée depuis le retour des talibans, le salaire de nombreuses femmes employées par des ONG permettait à leur famille de vivre.

 

En chassant les femmes de l’espace public, les talibans punissent toute leur société et la mettent en danger vital. Espérons que les hommes d’Afghanistan, et pas seulement les femmes, s’insurgent face à une décision aussi tragique.

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©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Le point de vue de 7h55

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