Accueil
Eau des nappes polluées : le prix de l'eau du robinet peut-il augmenter ?

Eau des nappes polluées : le prix de l'eau du robinet peut-il augmenter ?

Un article rédigé par Marie-Lucie Walch - le 16 juin 2025 - Modifié le 17 juin 2025
Le dossier de la rédactionEau des nappes polluées, bouteilles polluantes : que boire ?

En 2023, des analyses ont été réalisées à titre expérimental sur les nappes phréatiques de 8 sites français. Elles ont révélé la présence de polluants dont le taux dépasse le seuil autorisé à partir de janvier 2026. Les collectivités locales doivent donc s’organiser pour régulariser la situation respectueuse des normes sanitaires et environnementales. Mais à quel prix ? 

@ Canva@ Canva

A compter du12 janvier 2026, la France devra respecter une directive européenne concernant l’eau : le taux de Pfas, ces polluants éternels, ne devra pas excéder plus de 0,1 microgramme par litre d’eau analysé. Or, ce taux est largement dépassé dans l'agglomération de Saint-Louis (Haut-Rhin) au Sud de l’Alsace. 

Le système de “forfait” à Saint-Louis

La nappe qui dessert les 11 communes se situe à quelques kilomètres de l’aéroport de Bâle-Mulhouse qui utilisait jusqu’en 2017 des mousses anti-incendie à la forte teneur en Pfas. Les résultats n’ont pas tardé à confirmer la contamination des nappes environnantes : l’Agglomération de Saint-Louis est devenue le 3ème site de France présentant la plus forte teneur en polluants éternels. Au point que depuis le 5 mai 2025, la préfecture du Haut-Rhin a demandé aux personnes atteintes de maladie chronique, aux femmes enceintes et aux nourrissons de ne plus boire l’eau du robinet. 

 

Ces personnes sont donc forcées de recourir à de l'eau en bouteille. Pour ne pas ajouter aux charges de ce public fragile qui représente 3000 personnes, l’Agglomération a imaginé financer sa consommation en eau potable grâce à un forfait de 80€ destiné à couvrir l’achat de 2 litres de bouteilles d’eau par jour et par personne, soit un total de 250 000 euros. 

Augmenter le prix de l’eau pour couvrir son traitement ? 

A cette somme, il faut ajouter les frais d’installations de trois unités mobiles de traitement de la nappe polluée à l'automne avant la construction d’une usine de filtrage l’an prochain. Les coûts sont élevés puisque ces polluants résistants  n’ont pas mérité leur épithète d’”éternels” pour rien. Ces molécules résistent à l’eau, à la chaleur, et aux solvants. Thierry Litzler, le vice-président de l'Agglomération de Saint-Louis en charge de l’eau assure d’ailleurs que la commune est “seule” responsable du financement. Une situation injuste ?  “Plus que financeurs, les collectivités sont responsables. Elles ont donc une obligation de sûreté et de sécurité [sanitaire]. Seulement, elles sont tenues à égaliser leurs dépenses et leurs recettes” explique Pierre-Jean Dessez, délégué à l’environnement à l’UFC-Que Choisir l’Union fédérale des consommateurs en Grand Est.

 

En clair, pour compenser le traitement des polluants, les collectivités devront augmenter l’eau du robinet. Une décision à laquelle s’est pourtant refusée l'Agglomération de St Louis…au moins jusque fin 2025, durée de l’arrêté. Mais assurer la pérennisation de cette promesse suppose de ne plus être seul financeur et impose aux petites communes de nouer des partenariats économiques. 

 

Le principe “pollueur-payeur” n’est pas si évident 

A l’heure actuelle, l'Agglomération de Saint-Louis cherche des aides du côté de l’Etat via l’Agence de l’eau Rhin-Meuse ainsi que l'aéroport de Bâle-Mulhouse, responsable de la pollution des eaux environnantes.

 

La responsabilité de ce dernier tient plus de l’ordre moral que légal puisque  l'organisation de la vie civile et internationale imposent l’usage de ce type de mousses anti-incendies  sur les plateformes aéroportuaires jusque fin 2016. “La notion de ‘pollueur-payeur’ ne peut donc pas s’appliquer ici, puisque l’aéroport était soumis à une obligation légale, rappelle Thierry Litzler. Il faudra donc jouer sur la carte de l’obligation morale par rapport à leur responsabilité environnementale.”

 

Varier les points de captage

Avant l’entrée en vigueur de la norme du taux de Pfas réglementaire en janvier 2026, des tests devraient être effectués sur toutes les nappes phréatiques de France pour vérifier que les taux ne sont pas au-delà de ces normes. Certaines communes ont d'ailleurs pris un peu d'avance. C'est le cas de l'Eurométropole de Strasbourg. Lors d’un contrôle, les agents ont détecté la présence de Pfas dans l’un des trois points de captage de son eau. Les taux observés sont, pour l'instant, en dessous des limites fixées par l'Agence régionale de Santé.

 

Toutefois, l'Eurométropole a déjà pris des mesures et a suspendu ce capteur dans l’tatente d’un plan d’action. “Nous avons la chance d’avoir plusieurs cibles de captage avec une pollution très localisée, ce qui nous permet d’avoir plusieurs sources en eau potable, justifie Maxime Pomies, ingénieur innovation auprès du Service de l'Eau et de l'Assainissement de l’Eurométropole de Strasbourg. Varier les points de captage reste cependant une mesure que toutes les communes ne pourront pas nécessairement appliquer. 

 

Le dossier de la rédaction © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Le dossier de la rédaction
Le dossier de la rédaction © RCF
Découvrir cette émission
Cet article vous a plu ? Partagez-le :

Pour aller plus loin

Suivez l’actualité nationale et régionale chaque jour

Votre Radio vit grâce à vos dons

Nous sommes un média associatif et professionnel.
Pour préserver la qualité de nos programmes et notre indépendance, nous comptons sur la mobilisation  de tous nos auditeurs. Vous aussi participez à son financement !

Faire un don
Qui sommes-nous ?

RCF est créée en 1982, à l'initiative de l'archevêque de Lyon, Monseigneur Decourtray, et du Père Emmanuel Payen. Dès l'origine, RCF porte l'ambition de diffuser un message d'espérance et de proposer au plus grand nombre une lecture chrétienne de la société et de l'actualité.

Forte de 600.000 auditeurs chaque jour, RCF compte désormais 64 radios locales et 270 fréquences en France et en Belgique. Ces 64 radios associatives reconnues d'intérêt général vivent essentiellement des dons de leurs auditeurs.

Information, culture, spiritualité, vie quotidienne : RCF propose un programme grand public, généraliste, de proximité.Le réseau RCF compte 300 salariés et 3.000 bénévoles.