
La jeunesse française est-elle de plus en plus violente ? De récents faits divers semblent le montrer. On pense évidemment au meurtre du jeune Elia, poignardé en sortant de son entrainement de foot, dans le 14è arrondissement de Paris, au meurtre de Louise, tuée à coup de couteau dans l'Essone. Plus récemment, le meutre de Mélanie, surveillante de 31 ans, devant son collège en Haute Marne, tuée par un collégien. Et puis, la semaine dernière, à Argenteuil, une professeur du collège Lucie Aubrac reçoit des menaces de mort. La communauté éducative publie une tribune de soutien, la ministre de l'éducation nationale Elisabeth Borne réagit. Mais que vivent les professeurs sur le terrain ? Myriam Meyer, enseignante de lettres classiques, est au micro de RCF Notre-Dame.
La semaine dernière une enseignante du lycée Lucie Aubrac d'Argenteuil recevait une lettre de menace de mort de la part d'un élève. Avant elle, Mélanie, surveillante au collège Françoise Dolto de Nogent, était poignardée à mort par un collégien. Des cas loin d'être isolés pour Myriam Meyer, enseignante de lettres classiques au collège en banlieue parisienne.
Pour le ministère de l'Intérieur, les chiffres de la violence chez les jeunes diminuent depuis 2016. Les officiels pointent une baisse de 25% du nombre de mineurs poursuivis par la justice depuis 9 ans. Des statistiques qui ne collent pas à la réalité du terrain pour Myriam Meyer. "Je reçois quotidiennement et je lis quotidiennement des témoignages d'enseignants qui racontent la façon dont leur quotidien est abîmé, mis en danger par cette violence. Il y a encore une semaine, je lisais sur un forum d'enseignants six témoignages de collègues disant un élève est venu avec un poignard, un élève est venu avec un couteau..." Des faits de violences qui ne sont en général pas remontés à l'Éducation Nationale, toujours selon Myriam Meyer. "Les gens ont peur de porter plainte. [...] Quand ils témoignent, ils sont obligés de le faire. en cachant leur visage, en changeant leur nom. Ils ont raison d'avoir peur, je pense que l'actualité, tout ce qui s'est passé ces dernières années nous l'a prouvé mille fois."
Je reçois quotidiennement et je lis quotidiennement des témoignages d'enseignants qui racontent la façon dont leur quotidien est abîmé, mis en danger par cette violence.
Le sentiment d'insécurité chez le corps enseignant est aussi favorisé par un changement d'attitude de la part des parents. Si ces-derniers soutenaient plutôt les professeurs, ils se montrent de moins en moins supportifs avec les professeurs. "Il y a le sentiment chez de nombreux parents que finalement, parce qu'eux, ils ont des enfants, ils savent ce que c'est que d'être enseignant. Or, je rappelle qu'on l'a vu notamment pendant le Covid, on avait tous les parents de France qui étaient désespérés à bout de nerfs parce qu'ils avaient leurs enfants toute la journée à la maison." "La contestation permanente, en tout cas très fréquente, des sanctions, des punitions, le simple fait qu'on puisse mettre en cause leur enfant dans son comportement, peut occasionner de la part de certains parents des réactions très agressives et très violentes." Les professeurs se sentent de plus en plus esseulés face à une jeunesse qu'ils considèrent comme de plus en plus violente.
Quels moyens sont employés pour lutter contre ces faits de violences ? Les directions d'établissement ont généralement recours aux exclusions temporaires ou permanentes. Des mesures qui ne portent pas leur fruit, comme en témoigne l'assassinat de Mélanie au collège de Nogent. "L'élève qui l'a poignardé avait eu un jour d'exclusion par fait de violence. Il avait étranglé un élève de sixième, un jour d'exclusion. Il avait donné un coup de poing à un autre, un jour d'exclusion. Il me semble que ce n'est absolument pas du tout à la hauteur des enjeux." Des sanctions souvent diminuées par les personnels dirigeants, par peur de voir la situation empirer. "Admettons que vous excluez définitivement un élève de votre établissement, vous créez une place vide. Et donc, il y a fort à parier qu'on va vous envoyer un élève qui a été exclu définitivement d'un autre établissement dans le vôtre. Très souvent, on va dire, il vaut mieux un cas difficile qu'on connaît qu'un cas difficile qu'on ne connaît pas."
Suite aux menaces de mort proférées à l'encontre de la professeure du lycée d'Argenteuil, Elisabeth Borne a dit sur X tout son soutien à la communauté enseignante.
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