Le président de la République est attendu en Corse pour une visite de deux jours. Une visite particulièrement délicate alors que les revendications nationalistes se font plus pressantes.
Pour les Corses, "c’est une journée un peu particulière. Au mois de décembre dernier, les nationalistes ont largement remporté les élections territoriales, et nous fêtons aujourd’hui le 20ème anniversaire de l’assassinat du préfet Erignac avec la venue du président Macron. Il y a une attente pour beaucoup de nationalistes. Ils sont un peu dans le flou pour l’instant. Ils sont dans l’attente, un peu suspendus aux lèvres du président Macron" explique Mgr Olivier de Germay.
Olivier de Germay n’est pas corse. Il a été nommé évêque d’Ajaccio en 2012. En six ans, il a réalisé "qu’il était difficile de définir ce qu’est la spécificité corse", l’une des revendications des nationalistes actuellement, qui aimeraient que cette spécificité soit reconnue au niveau national. "Ce que j’en perçois, c’est que la Corse est une île magnifique, sauvage, rebelle. C’est aussi une histoire compliquée. Cette terre de Corse a longtemps été dominée par des puissances étrangères. Ce qui a engendré un certain nombre de frustrations. C’est enfin une culture spécifique, très importante, à laquelle les Corses sont très attachés" ajoute l’évêque d’Ajaccio.
Depuis son installation dans le diocèse d’Ajaccio, en six ans, le climat a profondément évolué. "En juin 2014, le FLNC a renoncé à la violence. Un choix qui s’est révélé payant puisque les nationalistes ont pu remporter la mairie de Bastia et d’autres municipalités, et puis ensuite les élections territoriales. Les choses ont donc bien changé, un apaisement arrive" précise Mgr Olivier de Germay qui rappelle que malgré les idées reçues, les préjugés, et certaines réalités comme la corruption et l’économie souterraine, il y a en Corse un fort potentiel. "Si les Corses veulent acquérir une plus grande autonomie politique, il faut acquérir une autonomie économique" lance-t-il.
Au milieu de tout cela se trouve les catholiques. "La société catholique est profondément imbriquée dans la société corse. Tous les courants sont représentés parmi la communauté catholique. Nous sommes dans le cadre de la laïcité, même si la laïcité corse est très spécifique, plus apaisée. L’Église peut favoriser un climat d’apaisement. Elle est présente dans tous ces événements douloureux. Elle est un peu au-dessus de la mêlée" explique l’évêque d’Ajaccio.
Parmi les points revendiqués par les nationalistes, figure notamment le rapatriement des prisonniers corses. "Nous visitons les détenus. J’y vais surtout au moment de Noël. C’est vraiment l’une des revendications sur laquelle l’État pourrait avancer. J’ai rencontré à Paris un prisonnier qui est en liberté surveillée, toujours pas jugé depuis deux ans, qui avait interdiction de rentrer en Corse où il a une femme et des enfants, et interdiction de travailler sur Paris. Ce sont des situations incompréhensibles. Ce serait vraiment un geste d’apaisement de la part du gouvernement" lance Mgr Olivier de Germay.
L’autre revendication, c’est la reconnaissance de la langue corse comme langue officielle. Mgr Olivier de Germay rappelle qu’il n’existe pas encore de missel en langue corse reconnu par Rome. "C’est une question que l’on m’a posée à mon arrivée. J’y suis totalement favorable. Nous avons mis en place une commission qui fait tout ce travail de traduction à partir du latin. J’espère que nous pourrons avancer pour avoir un missel corse et pouvoir célébrer la messe en corse de temps en temps" conclut l’évêque d’Ajaccio.
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