COP27 : des avancées en demi-teinte

Un article rédigé par Anne Henry - RCF, le 15 novembre 2022 - Modifié le 16 novembre 2022

Les négociateurs étaient rentrés avec inquiétudes dans la COP27 le 6 novembre dernier, à cause des tensions lors des pré-rencontres à Bonn et Bali. À la mi-temps de l’évènement, certains constatent tout de même un dialogue soutenu et des tractations qui ont abouti, mais pas forcément sur les attentes majeures.

Des manifestations de la société civile ont lieu au sein même de la COP27, Charm el-Cheikh, Égypte, le 14/11/2022 ©Anne Henry / RCFDes manifestations de la société civile ont lieu au sein même de la COP27, Charm el-Cheikh, Égypte, le 14/11/2022 ©Anne Henry / RCF

Un bouclier de protection mondial

 

Ce lundi 14 novembre, à la reprise des négociations, Stéphane Crouzat, ambassadeur français pour les négociations climat, faisait le point sur les avancées dans le bureau de la délégation française. Pour le financement des pertes et préjudices des catastrophes des pays vulnérables, la France, l’Allemagne, le Danemark, le Canada, l’Irlande et les USA ont annoncé le 14 novembre un "bouclier de protection mondial".

 

Ce mécanisme, doté notamment de 20 M€ par la France, est basé sur un modèle assurantiel. Mais cette proposition est critiquée par les ONG comme le souligne Aurore Mathieu du Réseau action climat : "Ce bouclier est imaginé en-dehors du cadre de la Cnucc (la convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique), ce qui obligera les pays défavorisés à payer des primes qu’ils ne pourront peut-être pas assumer."

 

Lutte contre la déforestation

 

Soulignons d’autres avancées en demi-teinte : la création d’une coalition en date du 14 novembre entre la République démocratique du Congo (RDC), le Brésil et l’Indonésie pour préserver leur forêt, menacée par des projets d’exploitation pétrolière et gazières et touchée par le réchauffement climatique. Cet accord appelle à un financement par la communauté internationale de la réduction de la déforestation, via entre autres, le marché du crédit carbone. Et ce même si ce marché n’est pour l’instant pas encore en place. Également, l’Inde a annoncé sa volonté d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2070, malgré un pique d’émission tardif des GES (gaz à effet de serre) en 2040. Stéphane Crouzat souligne néanmoins un partenaire de plus en plus actif.

 

Les moutons noirs

 

Mais l’ambassadeur reste préoccupé sur des points majeurs : seuls une trentaine de pays ont rehaussé leurs contributions déterminées au niveau national (CDN) pour atténuer le changement climatique, avec des annonces majeures dans ce sens durant la COP27, de la part du Mexique et de la Turquie.

 

Par ailleurs, la Chine, le plus gros émetteur de gaz à effet de serre, inquiète. Elle n’a pas rehaussé ses CDN et n’a toujours pas atteint son pic d’émission (c’est le cas en revanche pour l’Union européenne depuis 1990 et pour le Japon, Canada et USA depuis 2005). Or le GIEC insiste sur le fait que pour limiter à 1,5 degrés, il faut que les gros émetteurs atteignent leur pic entre 2020 et 2025. Autant dire demain.

 

Projet de résolution finale

 

Un premier projet de résolution finale ou cover décision a été proposé hier lundi. Il maintient le référentiel de 1,5 degrés comme hausse maximale de la température. "Mais ce point n’est pas gagné d’avance car il y a une forte pression de la Chine et de l’Arabie Saoudite pour le supprimer", souligne Stéphane Crouzat. Également, le projet inclut de porter le financement de l’adaptation de 20 à 40 milliards de dollars. Mais toujours rien sur la volonté exprimée par l’Inde et l’UE de sortir des énergies fossiles - cela est dû aux freins de l’Égypte et des Émirats arabes unis, qui souhaitent faire du gaz une énergie de transition.

 

Par ailleurs, pas de nouvelle au sujet d'un outil financier Cnucc pour financer les pertes et préjudices. Et la fameuse enveloppe annuelle des 100 milliards par an globale pour aider les pays du Sud (dont le financement de l’adaptation) n’est toujours pas atteinte. De quoi créer de grosses crispations chez les pays du Sud, qui dénoncent de plus en plus le modèle intrinsèque de la COP. Pour Stéphane Crouzat, "on est prudemment optimiste sur ce qui va se passer d’ici la fin de la COP".

 

D’ici là, les négociations vont se poursuivre, au rythme des manifestations de la société civile au sein même de la COP – une première. Mais aussi de la venue du futur président brésilien Lula et du vice-président de la Commission européenne en charge de l’Écologie, Frans Timmerman. Et aussi des décisions du G20 sur le climat qui a lieu en ce moment à Bali jusqu’au 16 novembre.

 

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