Comment adapter la ville aux enjeux climatiques ?
Fin juin a été exceptionnellement beau et chaud, caniculaire même. Juillet fait grise mine, du moins dans les régions septentrionales. Attention : ne confondons pas météo et climat. Ce qui compte, ce sont les tendances de fond, pas les aléas du quotidien. Or ces tendances indiquent un dérèglement que l’on peut constater dans plusieurs régions : prenons les châteaux de la Loire, exposés à des crues exceptionnelles, des sécheresses à répétition, des jardins en souffrance : comme une grande partie du patrimoine français, ils ne sont pas épargnés par une forme de dégradation. C’est le cas aussi en montagne où le manque d’eau, lié au recul des glaces, hypothèque le fonctionnement des refuges. La canicule du début de l'été 2025 a touché 60 départements entre le 19 juin et le 6 juillet, avec, disait récemment Santé publique France, 480 décès de plus que la normale. On sait que dans les villes, ces vagues de chaleur sont difficilement supportables. C’est soit on cuit, soit on fuit. Or on doit pouvoir échapper à cette alternative, sauf que l’urbanisation ne cesse de croître. Alors que faire ? Repenser la ville ? On le dit depuis longtemps déjà. Mais qu’adviendrait-il s’il faisait un jour 50 degrés à Paris, s’il y faisait aussi chaud qu’en Grèce et en Turquie en ce moment ?
Maud LELIÈVRE, docteure en droit de l’environnement, conseillère de Paris, présidente du Comité français de l'(Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).0 Auteur de Faire face à la canicule (DDB) © DDBMaud Lelièvre, docteure en droit, a publié un rapport intitulé « Paris à 50 degrés ». Précisément, si Paris connaissait actuellement les mêmes températures que la Grèce ou la Turquie, que se passerait-il ?
Adapter la ville
50 degrés, ce n’est pas un scénario hypothétique, explique Maud Lelièvre. Il s’agit de projections sur lesquelles la Ville de Paris travaille, à travers différents plans d’adaptation. « Et cela ne concernera pas seulement Paris, mais aussi d’autres villes. Les villes du Nord sont moins adaptées, car leur urbanisme est plus dense, différent, et les rues s’y réchauffent plus vite. »
Cela signifie rénover en profondeur une ville, repenser ce qui est invisible.
Le maître mot de l’adaptation, c’est l’anticipation, prévient la docteure en droit. « Cela signifie rénover en profondeur une ville, repenser ce qui est invisible. »
Il faut, par exemple, concevoir des corridors d’air, c’est-à-dire rouvrir les espaces urbains. Au Japon, cette approche existe déjà : certaines tours ont été détruites parce qu’elles bloquaient ces flux d’air. « Il faudra faire appel à des solutions naturelles », insiste Maud Lelièvre. Cela passe notamment par la végétalisation des espaces et la rénovation thermique des logements.
Développer un plan d’urgence
L’État et les collectivités doivent développer des plans d’urgence. À l’instar des inondations ou des tempêtes, les canicules sont aussi des catastrophes naturelles pour lesquelles il est essentiel de prévoir une réponse anticipée, explique la spécialiste. « Je suis profondément convaincue que, par la lutte contre le réchauffement climatique et l’adaptation, on répond aussi à des enjeux sociaux. On ne peut pas laisser des enfants étudier dans des écoles surchauffées. »
Je suis profondément convaincue que, par la lutte contre le réchauffement climatique et l’adaptation, on répond aussi à des enjeux sociaux. On ne peut pas laisser des enfants étudier dans des écoles surchauffées.
Ce plan pourrait inclure une révision du calendrier scolaire ou des horaires de travail, afin d’éviter les heures les plus chaudes. « Un plan d’urgence, ce n’est pas simplement attendre qu’il fasse chaud pour installer des brumisateurs et ouvrir les parcs la nuit. Il faut un plan structuré, comme il existe des plans inondations ou des plans Seveso dans les zones industrielles. Il faut considérer que la chaleur n’est pas une simple température estivale, mais une véritable catastrophe naturelle. »


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