Artisanat en plein renouveau : retour à l’authentique ou mode passagère ?

Longtemps perçu comme un vestige du passé face à l’industrialisation et à la consommation de masse, l’artisanat connaît aujourd’hui un véritable renouveau. 

L’artisanat, un regain d’intérêt authentique

Un retour à l’essentiel. "Longtemps considéré comme une voie de garage, aujourd’hui les métiers manuels séduisent de plus en plus de personnes, y compris des cadres et ingénieurs", introduit Nicole, auditrice, dans l’émission Je pense donc j’agis. Mickaël Trentin, responsable marketing et communication pour PassPassion, entreprise qui propose des stages et formations pour découvrir les métiers artisanaux, confirme ce phénomène : "la notion d’artisanat est très complexe, elle regroupe plusieurs métiers, manuels et d’art. Le fil rouge reste la main, le manuel, le retour au geste". Selon lui, le regain d’intérêt s’explique par une véritable quête de sens. "Travailler avec les mains, produire un objet fini et le voir chez quelqu’un apporte énormément de satisfaction", souligne-t-il.

Le vitrail m’a permis de rebondir après un burn-out et de retrouver un sens à mon travail.

Des reconversions professionnelles en hausse. La période post-Covid a accentué ce mouvement selon Mickaël Trentin qui note "qu'après le Covid, beaucoup ont eu des questionnements sur leur avenir et leur métier. Cela a été prépondérant dans la demande de reconversions vers l’artisanat". Cette tendance ne se limite pas à un retour nostalgique, elle traduit un besoin profond de créativité et d’autonomie. Marie-Pierre Bouaziz, artiste vitrailliste à Paris, témoigne que "parfois, il y a des moments difficiles dans la vie. Le vitrail m’a permis de rebondir après un burn-out et de retrouver un sens à mon travail". Élodie, artisane réalisant des dessins sur vitrines, raconte : "les passants sont très interpellés de voir quelqu’un dessiner de manière spontanée. Ils apprécient ce qui vient du cœur, du fait main". Le regain d’intérêt se manifeste donc à la fois par la reconversion professionnelle et par la valorisation sociale des métiers de la main.

Entre authenticité et adaptation à la modernité

Des métiers traditionnels qui se transmettent. Certains métiers artisanaux, comme le vitrail ou la papeterie, se perpétuent en respectant des techniques ancestrales. Sophie Bernert, papetière, explique que "la papeterie, c’est transformer des fibres en papier. Nous travaillons avec des plantes ou de vieux chiffons, comme au Moyen-Âge". Marie-Pierre Bouaziz confirme que le vitrail reste fidèle aux techniques traditionnelles au plomb, malgré quelques innovations marginales. "Même pour la restauration, la technique ancestrale du vitrail reste la plus demandée", précise-t-elle. Si les gestes restent traditionnels, la visibilité et la commercialisation passent désormais par le numérique. "Les réseaux sociaux et les moteurs de recherche sont indispensables pour se faire connaître, surtout en province", insiste l'artiste vitrailliste, qui compte 45.000 abonnés sur Instagram. "On conseille à nos stagiaires de se montrer, de partager leur travail et de créer une présence numérique efficace. Cela permet aux artisans de vivre de leur passion", raconte Mickaël Trentin.

Ce ne sont plus les métiers de bureau qui attirent, mais ceux qui permettent de travailler avec ses mains.

Éducation et transmission : l’avenir de l’artisanat. Des initiatives comme l’association De l’Or dans les Mains permettent de sensibiliser le jeune public à ces métiers. "Nous montrons aux élèves de 6e et 5e que le faire avec les mains est possible et passionnant. Cela ouvre des perspectives pour de futurs artisans", raconte Sophie Bernert qui intervient dans l'association. Ces programmes contribuent à redonner ses lettres de noblesse à l’artisanat, longtemps dévalorisé dans le système scolaire. Une mode ou un vrai mouvement de fond ? Si certains peuvent voir dans ce regain une tendance passagère, les témoignages convergent vers un constat : l’artisanat est en train de se réinventer tout en conservant son authenticité. Le besoin de sens, l’envie de créer et la valorisation des savoir-faire manuels sont des moteurs puissants. "Aujourd’hui, ce ne sont plus les métiers de bureau qui attirent, mais ceux qui permettent de travailler avec ses mains, de créer, et de servir la population", conclut Mickaël Trentin