Arménie-Azerbaïdjan : un accord sous influence américaine
L’Arménie et l’Azerbaïdjan ont signé, vendredi 8 août à Washington, un accord de paix qualifié d’« historique » par Donald Trump. Cet accord vise à mettre fin au conflit territorial qui oppose les deux pays depuis des décennies et à permettre aux États-Unis d’avancer leurs pions dans une région hautement stratégique. Dans le même temps, des tensions éclatent entre le gouvernement arménien et l’Église apostolique du pays. Décryptage avec Pierre Ouzoulias, sénateur communiste des Hauts-de-Seine et vice-président du groupe d’amitié France-Arménie.
Des jeunes hommes d origine armenienne portent sur leur dos un drapeau de l Armenie et tiennent dans la main un fumigene qui diffuse une fumee epaisse orange et bleu et une pancarte avec le message L europe se tait Aliev tue dans le cortege de 500 personnes de la communaute armenienne qui manifestent dans les rues de Valence, France, le 24 avril 2025. © Nicolas Guyonnet/ Hans LucasUn sommet s’est achevé vendredi 8 août entre l’Arménie, l’Azerbaïdjan et les États-Unis, dans le but de parvenir à un accord de paix depuis l’attaque contre le Haut-Karabakh, qui avait provoqué la fuite de près de 100 000 Arméniens de cette région.
Une Europe écartée des négociations de paix
Pour Pierre Ouzoulias, le constat est clair : l’Europe est complètement hors du jeu. De par son positionnement politique, elle ne peut pas mener les négociations, étant tiraillée entre la dépendance de l’Allemagne au gaz azéri et le soutien affiché de la France à l’Arménie. « C’est Trump qui va permettre la réalisation d’un accord entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Or, l’Europe avait la possibilité de contraindre Bakou, car le gaz azéri est aujourd’hui largement acheté par l’Europe : nous avions donc un moyen de pression que nous n’avons jamais utilisé », déplore le sénateur des Hauts-de-Seine.
On sait très bien que Trump ne fait jamais les choses gratuitement. Je pense que, derrière cet accord à venir, il y a un intérêt pour les réserves minières de l’Arménie.
Au-delà de la mise à l’écart du pouvoir diplomatique européen, l’implication des États-Unis laisse la porte ouverte à des accords sur l’exploitation des ressources minières abondantes dans la région, notamment dans le corridor de Zanguezour, aussi appelé Syunik. Pierre Ouzoulias rappelle : « On sait très bien que Trump ne fait jamais les choses gratuitement. Je pense que, derrière cet accord à venir, il y a un intérêt pour les réserves minières de l’Arménie. »
Une Arménie affaiblie à la table des négociations
L’Arménie est également fragilisée par des dissensions internes, en raison du conflit opposant le Premier ministre Nikol Pachinian à l’Église apostolique arménienne. Le 9 juin 2025, le chef du gouvernement a frontalement attaqué le catholicos Karékine II, dont il a publiquement réclamé la démission. Le catholicos de tous les Arméniens, qui réside à Etchmiadzin, en République d’Arménie, est considéré comme le chef suprême de l’Église arménienne et porte le titre de « patriarche suprême et catholicos de tous les Arméniens ».
L’Arménie a fait acte de candidature pour entrer dans l’Union européenne. Elle estime, à juste titre, que la Russie l’a trahie et ne l’a absolument pas défendue lorsque l’Azerbaïdjan a pris l’Artsakh.
Figure très influente auprès d’une population à 97 % chrétienne, Karékine II a, à plusieurs reprises, tenté de réaliser des coups d’État et souhaite maintenir l’alliance avec la Russie. À l’inverse, le gouvernement arménien veut se rapprocher de l’Union européenne, explique Pierre Ouzoulias : « L’Arménie a fait acte de candidature pour entrer dans l’Union européenne. Elle estime, à juste titre, que la Russie l’a trahie et ne l’a absolument pas défendue lorsque l’Azerbaïdjan a pris l’Artsakh. Je pense que c’est un élément très important, qu’il faut soutenir, car l’Europe peut être un pôle de stabilité dans cette région du monde, le Caucase, qui nous touche directement. »


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