Après l'élection de Bruno Retailleau, cap sur 2027 pour la droite républicaine
La droite républicaine retrouve un capitaine, 2027 à l'horizon pour Bruno Retailleau et les Républicains. L'actuel ministre de l'Intérieur et donc nouveau chef du parti après sa victoire dans l'élection interne dimanche 18 mai se met déjà en ordre de bataille pour le scrutin présidentiel. La convocation d'un conseil stratégique au sein du parti mardi 20 mai ne trompe personne : Bruno Retailleau compte bien être « le premier artisan » d'un succès à retrouver pour les LR. Ses soutiens aussi voient loin, mais attention : pas de précipitation pour le député roannais Antoine Vermorel-Marques (LR) : la victoire de son favori à la tête du parti n'occulte pas l'urgence de construire un projet.
Antoine Vermorel-Marques, député de la 5e circonscription de la Loire (LR), l'invité de la matinale de RCF Lyon - DR« Ça n’est pas avec un chef qu’on gagne une présidentielle, c’est avec des idées »
RCF Lyon : À peine élu, déjà aux commandes : Bruno Retailleau qui convoque son premier conseil stratégique au sein du parti ce mardi 20 mai, ça ressemble déjà à un ordre de bataille pour 2027 ?
Antoine Vermorel-Marques : Il nous manquait un chef, on a désormais un chef, mais ça n'est pas avec un chef qu'on gagne une élection présidentielle, c'est avec des idées et un programme : maintenant le plus dur est devant nous, c'est d'arriver à la fois à rester uni, mais aussi de proposer des idées neuves pour le pays qui a tant besoin de ruptures et de changements, et c'est ce à quoi on va s'atteler avec Bruno Retailleau.
RCF Lyon : Un chef de parti, un candidat aussi pour la présidentielle : son élection exclut une primaire interne dans deux ans chez les LR ?
AVM : Il le dit, c'est « colline après colline », on a beaucoup de talent dans notre famille politique, on l'a vu avec Michel Barnier aussi et je pense que c'est prématuré pour l'instant de parler d'élection présidentielle. Vous savez, il y a un an, on était à 5 % dans les élections, aujourd'hui on commence à se reconstruire et cette reconstruction doit passer par des idées, par un programme, par un projet. Et c'est ce à quoi moi j'attelle, de façon à ce qu'on soit crédibles pour 2027.
Même lui le dit et je pense qu'il est sincère dans cette démarche : on doit mettre les idées d'abord et les personnes après
C'est quelque chose qui nous dépasse, d'ailleurs, quand on fait de la politique : on s'engage pour des idées, pour changer la vie des habitants de notre circonscription ou de notre pays. Et si on veut changer vraiment la vie et faire en sorte que les choses s'améliorent en France, il nous faut d'abord et avant tout travailler sur le programme, que ce soit sur la rémunération du travail (il y a trop de travailleurs pauvres, il y a trop de personnes qui travaillent aujourd'hui et qui ne s'en sortent pas), comme sur le rétablissement de l'ordre. On le voit tous les jours : la crise de l'autorité, la crise des valeurs morales de notre pays est très forte et ça ne nécessitera pas simplement un président de la République mais un programme législatif très fort pour arriver à renverser cette tendance, qui malheureusement dure depuis de nombreuses années.
RCF Lyon : Vous connaissez Bruno Retailleau, vous avez déjà parlé avec lui de ce fameux projet de rupture. À quoi ressemblerait-il ?
AVM : J'ai échangé avec lui depuis son élection et je le connais depuis de nombreuses années, je l'avais déjà soutenu en 2022 et c'était une continuité de pouvoir le soutenir dans cette élection interne.
Ce projet de rupture repose sur deux axes principaux. D'abord, la rémunération du travail, la valorisation de la valeur travail qui permettra à chacun de s'en sortir quand il travaille ; puis le rétablissement de l'ordre
Le rétablissement de l'ordre, c'est l'ordre à nos frontières, l'ordre dans nos rues, l'ordre dans nos écoles, l'ordre aussi dans nos comptes : on n'en parle pas assez, mais la dérive de l'endettement de notre pays est très grave notamment pour les générations à venir. Le sujet qui m'est également cher et sur lequel la droite pour l'instant est trop faible, c'est la question de l'environnement qui doit devenir centrale dans les années à venir.
RCF Lyon : Son concurrent à la tête du parti, Laurent Wauquiez, a notamment joué sur le double costume aujourd'hui porté par Bruno Retailleau. N'est-ce pas compliqué d'avoir un œil sur Beauvau et un autre sur l'Élysée ?
AVM : Je pense que cette question a été tranchée par les militants, le score est clair et sans ambiguïté, les adhérents des Républicains souhaitent que Bruno Retailleau soit ministre de l'Intérieur, fasse de son maximum malgré le contexte et l'absence de majorité parlementaire et permette à la droite de retrouver aussi ce qui nous manquait ces dernières années, c'est-à-dire une capacité d'action. Aujourd'hui, tout le monde reconnaît le volontarisme de Bruno Retailleau et sa capacité d'agir pour le quotidien des gens, donc c'est ça qu'il nous faut pour montrer que la droite au pouvoir arrive à agir.
RCF Lyon : Est-ce plutôt un risque ou une opportunité d'être en fonction aujourd'hui au ministère de l'Intérieur en vue de 2027 ?
AVM : Il faut être franc, on préférerait avoir un contexte plus favorable avec une majorité parlementaire clairement à droite à l'Assemblée nationale et au Sénat : ce n’est pas le cas. Donc aujourd'hui, on a juste pris nos responsabilités pour faire en sorte d'éviter le pire au pays, et ce qui nous importe maintenant, c'est d'avoir des résultats. Après, je crois qu'au sein du gouvernement, l'homme fort c'est Bruno Retailleau, en tout cas les sondages le montrent et c'est ce que montrent aussi sa popularité et le résultat de dimanche dernier. Il doit jouer de cette force pour gagner des rapports de force justement et faire en sorte qu'il obtienne des résultats le plus rapidement possible.
RCF Lyon : Un mot pour Laurent Wauquiez, ex-président de notre région et surtout chef de file de votre groupe parlementaire à l'Assemblée nationale ?
AVM : Je suis très fier de l'avoir en tant que président de groupe à l'Assemblée nationale, je pense que cette élection n'était pas une élection contre quelqu'un. Les militants ont voté pour Bruno Retailleau ou pour Laurent Wauquiez, ils n'ont pas voté contre Bruno Retailleau ou contre Laurent Wauquiez, donc ce qui compte maintenant c'est qu'on reste unis.
On a souvent été la droite la plus bête du monde, maintenant il faut qu'on arrive à travailler tous ensemble
On a un chef, il a une légitimité très forte et c'est charge à nous de mener le rassemblement et surtout de travailler sur les idées, parce que sinon, on n'arrivera pas à percer le mur du son et à convaincre les Français qu'on est crédibles pour changer leur avenir.
Un député face aux effets psychologiques de TikTok
RCF Lyon : Un mot sur votre actualité parlementaire. Vous avez intégré récemment une commission d'enquête sur les effets psychologiques du réseau social chinois TikTok. Vous mettez en avant de possibles effets néfastes de la plateforme notamment sur les jeunes, mais vous aussi l'utilisez pour votre communication politique personnelle (vous êtes suivi par près de 4 000 personnes sur la plateforme) : n'est-ce pas un peu spécial de combattre un outil que vous utilisez vous-même ?
AVM : Non, parce que je pense que tant qu'on n'arrive pas à légiférer, il faut qu'on aille sensibiliser sur ce réseau, et les vidéos que j'y publie sont justement des vidéos pour sensibiliser les jeunes à la question de l'addiction aux écrans. J'ai d'ailleurs déposé des propositions de loi en ce sens.
Je pense que les écrans sont aujourd'hui une source de grandes difficultés quand ils sont mal gérés : c'est un outil formidable, mais qui peut en même temps être aussi très dangereux, notamment en termes de santé mentale
À la suite de vidéos sponsorisées, on a des jeunes qui malheureusement sont addicts à certaines drogues ou vont même jusqu'à se suicider, malheureusement : c'est à nous de pouvoir réguler ce réseau social pour que ça s'arrête et faire en sorte de protéger les jeunes, mais aussi les adultes, qui peuvent parfois aussi tomber dans une spirale très dangereuse pour eux-mêmes.
RCF Lyon : Vous êtes d'ailleurs d'accord avec l'idée avancée par l'ex-Premier ministre Gabriel Attal : l'interdiction des réseaux sociaux avant 15 ans, c'est quelque chose sur lequel vous êtes d'accord ?
AVM : 100 % d'accord, moi j'ai même proposé l'interdiction de tous les écrans avant 3 ans, et je pense aussi qu'en matière de pornographie ou en termes d'addiction, on doit être beaucoup plus ferme vis-à-vis des plateformes et on doit, avec l'ARCOM, fermer des sites internet qui ne respectent pas notre réglementation. C’est un enjeu de santé mentale, d'égalité femmes-hommes, et enjeu commercial et de souveraineté. Je rappelle que cette plateforme chinoise, TikTok, est fermée la nuit pour les mineurs en Chine, n'a pas le même algorithme là-bas que chez nous : nous, on est trop naïfs par rapport à toute cette influence chinoise qui peut être néfaste pour notre jeunesse.


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