À Vézelay, 3 600 routiers Scouts d’Europe ont fêté leur 50e pèlerinage de Toussaint

Sur la colline éternelle de Vézelay, jamais ils n’ont été aussi nombreux à arriver par différents chemins. Sac sur le dos, bâton à la main, foulard brun noué autour du cou, les routiers Scouts d’Europe convergent vers la basilique après quatre jours de marche dans les collines bourguignonnes. Vézelay, pour eux, ce n’est pas qu’un rassemblement : c’est une route. C'est par équipe qu'ils suivent différents tronçons et vivent un moment de marche, de chants, de prières, et de moments de rencontres et de fraternités autour du feu. Les routiers vivent une messe quotidienne dans les églises paroissiales entourant la cité médiévale.

Pour beaucoup, comme l'explique Martin de Villeneuve, commissaire national route, ces jours sont un temps de respiration intérieure, loin des écrans, du bruit, des agendas saturés. "À l’heure route, on a une heure par jour où chaque routier est invité à se poser, contempler la nature et se demander quelles sont les questions de sa vie. C’est une heure sans notification… pour un jeune de 17 à 19 ans, ça n’existe plus. On vient apporter un calme qui leur permet de se ressourcer. C’est une aventure intérieure."

Autour du bivouac du soir, les chants montent doucement. Au petit matin, les sacs se referment et la marche reprend, jusqu’à la montée finale sur Vézelay. Le samedi soir, les routiers cheminent vers le parvis de la Basilique où les attend un spectacle de son et lumière sur l'histoire de ce lieu multiséculaire. C'est au son du "Kyrie des Gueux" que ceux qui ont prononcé leur ultime engagement frappent sur les portes de l'édifice avec leur bâton fourchu. Les portes s'ouvrent et la basilique accueille ces routiers pour une soirée d'adoration et de confessions. Arthur, originaire de Versailles et qui découvre Vezelay pour la première fois, garde ce moment dans sa mémoire. « L’entrée dans la basilique, c’est une force d’émotion incroyable. " Pour beaucoup de jeunes, la découverte est bouleversante. Alexandre est aussi touché par ce moment de communion : "Quand on est dans le clan, on est à peu près 30, mais là lorsqu’on est 2 000, c’est autre chose. La force de la cohésion, c’est très impressionnant." Pour d’autres, comme Paul-Élie, 17 ans, de Lille, c’est une révélation : "La grande fraternité de la route… je ne connaissais pas bien la progression, mais j’en suis très satisfait et extrêmement content d’être venu."

Le lendemain matin, les routiers concluent leur pèlerinage autour de Mgr Pascal Wintzer, archevêque de Sens-Auxerre, diocèse du lieu. Victor, venu de Dordogne, en est déjà à sa troisième édition, mais l’émotion reste intacte : " Quand je vois tous ces jeunes qui se réunissent autour de Dieu, il n’y a pas plus beau… je me retrouve toujours avec la larme aux yeux pendant la messe… mon cœur et mon âme s’élèvent. J’en ressors grandi, rempli encore plus de foi." Son moment préféré, c’est le chant d’offertoire de la messe :"À chaque fois, avec l’orchestre et les voix… c’est absolument magnifique."

Une 50ᵉ édition chargée d'histoire

Ce rassemblement d’ampleur est pourtant né dans la simplicité d’une intuition spirituelle, il y a cinquante ans. En 1976, une poignée de routiers se retrouvent pour la première fois à Vézelay. Ils sont 150. Personne alors n’imagine que l’événement deviendra l’un des rendez-vous majeurs du scoutisme catholique eurpéen. Bruno Borde, venu présenter sa collection scoute racontant cette longue histoire, en faisait partie. Cinquante ans plus tard, il retrouve toujours la colline avec émotion : "À Vézelay en novembre 1976, se sont retrouvés 150 routiers. Aujourd’hui nous sommes dans les 3 600…" Pour lui, au-delà du chiffre, l’esprit n’a pas changé : "Le message d’un garçon de 17 ans en 1976 est le même aujourd’hui. C’est la même magie qui opère… les fondamentaux restent les mêmes : la marche, la simplicité, la prière."

Au fil des années, le pèlerinage s’est transmis de génération en génération, sans perdre de sa force. Une fidélité et une croissance qui surprennent jusque dans le mouvement lui-même. Martin de Villeneuve, commissaire national route, le souligne : "On a des effectifs avec une croissance de start-up : il y a deux ans, on était 2 400, cette année, on est 3 500. On a une jeunesse qui a besoin de repères." Pour lui, l’actualité du message explique cette dynamique : "La route reste le cœur du scoutisme… une aventure intérieure qui répond à une vraie soif. On voit des jeunes qui veulent du vrai, de l’essentiel."

Des routiers d'Europe et d'ailleurs

Si Vézelay demeure un rendez-vous français, sa dimension internationale n’a cessé de s’affirmer au fil des décennies. Sur les chemins, on croise des foulards venus de toute l’Europe. Cette année, près de 500 routiers étrangers ont marché vers la basilique, dont des Suisses, des Américains, des Brésiliens ou encore 180 Belges, la plus grande délégation internationale. Une richesse pour l'un des routiers français, qui s'enthousiasme : "On a marché avec des Polonais, des Belges, des Luxembourgeois… C'était rempli de richesses. C’était très heureux."

Pour Pierre-Marie, chef à Arlon, revenir à Vézelay est devenu un passage attendu : "On est toujours très contents de venir. Pour nous c’est vivre vraiment la communauté d’hommes, se ressourcer, avoir de l’énergie pour reprendre notre boulot, notre famille, nos amis en revenant en Belgique." David, qui franchit la frontière linguistique flamande à ces occasions, exprime la même joie : "Il n’y a pas vraiment un équivalent en Belgique comme Vézelay. On s’inspire beaucoup de la France. Et entendre ces chants, chanter avec eux… ça nous fait chaud au cœur."