15 août : Marie, l’innocence saluée et chantée.
On célèbre de façon juste et large, sans nul doute, en ce 15 août, la Vierge Marie et son Assomption, sa montée dans la gloire céleste, sa Dormition, d’un bout à l’autre du monde. Et largement, clairement : à Ajaccio comme dans toute la Corse aussi, bien sûr ! Retour avec l'historien Raphaël sur certains aspects importants de cette haute tradition et de toute cette ferveur mariale dans notre île et pour les Corses, et cela : fortement dans son histoire autant que pour son temps présent...
En rendant ainsi, en ce jour essentiel et à la Mère du Christ bien peu de l’hommage qu’elle mérite, c’est l’innocence parfaite qu’elle représente et qu’elle est nettement qu’on salue. Celle que, seule, elle partage pleinement avec son Fils. On prie, en ce jour capital, et on chante assurément pour Marie : en Corse, dans toutes les églises le splendide « Dio vi Salvi Regina ! » retentit. L’histoire de ce chant est-elle si connue ? Elle est bien vieille, cette suite de paroles et sa musique. Et bien forte autant que belle.
Une tradition orale et villageoise, sincère mais fautive, affirmait que c’était l’œuvre, en 1730, d’un berger corse, nommé Sauveur Costa ! Le « Dio vi Salvi Regina » dépasse ce cadre légendaire. D’où vient-il ? D’abord, d’une prière chantée, en langue latine, œuvre d’un évêque du Puy en 1080, Adhémar de Monteil, qui, devenu chef des premiers Croisés et légat papal, mourut de la peste à Antioche, en 1098. Sa bannière portait l’image de Marie. Il composa donc le chant originel latin, le merveilleux « Salve Regina ». Divers ordres monastiques propagèrent le chant dans toute l’Europe. Des variations ou compléments s’y ajouteront.
Le « Dio vi Salvi Regina », si cher à la Corse, si pleinement touchant, reste l’éclatante adaptation de ce premier chant, entonné par les Chrétiens en Orient puis en Occident ! Avant donc d'être choisi par les chefs corses sans doute dès janvier 1735 contre le despotisme génois (même si des évêques en Corse liés à Gênes ou des visiteurs ecclésiastiques le propageaient dans l’île aussi au-delà de 1735), lequel était inapte d’abord à rendre la justice, l’éloge chanté de Marie existait de longue date : il ne fut pas le seul symbole marial du royaume corse : on choisit « pour sa protection, l’Immaculée Conception de la Vierge Marie dont l’image sera empreinte sur ses armes et ses étendards : on en célébrera la fête dans tous les villages avec des salves de mousqueterie et de canons ».
C’est l’œuvre, ce chant, entre 1676 et 1681, d’un grand prédicateur et compositeur officiant à Naples, Francesco da Geronimo. Il fut repris par des chorales de rues à Naples, pendant ses sermons ! Succès total, l’hymne devint une prière quotidienne des Jésuites et se répandit dans les couches populaires. Le prêcheur-compositeur s’adressait à une foule de pécheurs et pécheresses. Entré en Corse, via les publications du clergé génois, par l’enseignement jésuite et franciscain puis de nombreux Corses installés à Naples dès la fin du dix-septième siècle, ce chant marial fut modifié, donc : soit dès 1735, soit peu d'années après : c’est ainsi que l’on passa de la victoire demandée contre les ennemis de la Vierge et des femmes malheureuses ou des hommes qui, sous sa protection bienveillante allaient au repentir, à un triomphe réclamé contre les ennemis du royaume marial, notre île entière, notre île en drames, notre île pauvre et vaillante, mais alors et depuis : protégée par l’innocence absolue et véritablement : royale de la Vierge. Cette Vierge qui nous est si intime et si sainte et dont le 15 août, toujours suivi avec ferveur et émotion chez nous, marque la Dormition, précisément : son Assomption céleste, son accueil glorieux par son Fils auprès de lui comme auprès du Père ! RL.
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