Denis OLIVENNES, normalien, chef d’entreprise, essayiste. Auteur de Dictionnaire amoureux des juifs de France (Plon)
Une minute de silence à Jérusalem ce matin pour marquer le deuxième anniversaire du jour le plus meurtrier qu’ait connu Israël, sur fond de pourparlers indirects avec le Hamas et de l'espoir ténu de la libération des otages à Gaza et de la fin de la guerre qui a dévasté ce territoire. Entre les cactus et les eucalyptus du désert du Néguev, une fresque représente les portraits de tous ceux qui ont été tués lors de la fête techno, ponctuée de nombreux visages souriants. Des portraits, Denis Olivennes en dessine aussi avec sa plume, au fil d’un Dictionnaire amoureux des juifs de France, comme si l’urgence commandait de se souvenir que notre pays est l’un des plus philosémites du monde. Deux ans après le 7 octobre, au-delà de la sidération, c’est la peur de voir l’ignorance abîmer la réalité d’une si longue présence, même si on limite le plus souvent l’assimilation des juifs à trois mesures, la citoyenneté obtenue en 1791, le décret de 1808 sur le consistoire et le décret d’Adolphe Crémieux octroyant la citoyenneté aux juifs d’Algérie (1870). Au-delà de ces actes, c’est un tutoiement multiséculaire entre les juifs et la France, y compris à l’ère médiévale. 114 entrées permettent ici d’en saisir la diversité, d’Offenbach à Gérard Oury. En politique, Robert Badinter panthéonisé jeudi illustre cette longue tradition. Politiquement, les juifs se sont inscrits dans le courant progressiste, identifié à une forme de prophétisme. La gauche, après l’affaire Dreyfus, épouse ce mouvement, portant au pouvoir un Léon Blum. Mai 68 fait émerger bon nombre d’intellectuels juifs à l’extrême-gauche, laquelle aujourd’hui se rétracte sur une histoire antisémite antérieure à l’affaire Dreyfus et qui assimile le juif à l’argent et à l’ennemi des travailleurs, sur fond de complicité avec l’islamisme.